Ma première conférence sur l’informatique à 12 ans

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Les belles histoires de tonton Prez !

J’ai 12 ans à peine en 1984 et cette année est particulièrement importante pour mon développement personnel dans l’informatique.

En effet, si j’ai eut ma première console de jeu, une Videopac G7000 à Noël 1981, à 9 ans donc, mais je restais sur ma faim car je ne comprenais pas encore comment on fabriquait des jeux vidéo. J’avais bel et bien ouvert la console pour regarder à l’intérieur et essayer de comprendre comment elle fonctionnait, mais je m’étais rendu compte très vite que c’était les cartouches, les logiciels donc, qui contenait les jeux eux-mêmes. Et grâce à des articles dans différents magazines dont certains très sérieux pour adultes, j’avais compris que pour créer des jeux vidéo, il fallait les programmer avec un ordinateur. Il me fallait donc un ordinateur !! Mais comment faire ? Les prix d’un micro-ordinateur classique en 1982 étaient incroyablement élevés, entre les Apple II à 10.000 francs,, les TRS-80 à 8000 francs, les Commodore à plus encore. Même les machines grand public comme le VIC-20, C64 ou TI994/A en 1984 étaient beaucoup trop chères pour moi et ma famille.

Et puis, en mai 1984, je passais au centre commercial Montlaur du coin avec mes parents, et je vois une boutique que je ne connaissais pas encore, à l’extérieur du centre qui plus est, une boutique Tandy. Oh, le rêve ! Pleins de composants électroniques, de jouets, d’ordinateurs même ! Evidemment, nous étions encore à l’ère des TRS-80 Model III ou IV, donc à 30000 ou 40000 francs. Ohlalalaa. Mais j’aperçois soudain en vitrine un tout petit micro-ordinateur, tout blanc et tout mignon, et surtout affiché à un prix incroyable. :1195 francs ! Wow !! comment se fait-il qu’un vrai micro-ordinateur, couleur en plus, avec un clavier comme un vrai hein, ne soit qu’à 1195 francs ? C’était extraordinaire ! Il me fallait absolument cette machine.

Quelle joie de te retrouver 37 ans plus tard mon MC-10 ! même si ce n’est pas la machine de mes 12 ans 🙂

Et comble de chance, c’était l’année de ma communion solennelle. Comme je ne pensais qu’à mon petit ordinateur Tandy à 1195 francs, j’ai réussi à me le faire offrir. J’ai alors reçu cette jolie petite machine comme un cadeau divin. Est-ce qu’il allait me permettre de créer des jeux vidéo ? Vers quels horizons, jusqu’à quelles frontières allait il pouvoir m’amener ? J’étais tellement excité mais tellement respectueux de cette machine et ce qu’elle pouvait m’apporter, que j’ai ouvert la boite avec une humilité et une délicatesse extrême. Lorsqu’il a démarré la première fois, après avoir fait 10 fois le tour de la connectique et du manuel d’instruction, je suis resté bouche bée. J’y étais ! Mon ordinateur à moi ! Et je pouvais le programmer ! C’était fou !!

Alors, j’ai appris à le connaitre, à explorer ses (faibles il faut bien le reconnaitre) capacités. Il faut se rappeler qu’à l’époque, les premiers micro-ordinateurs étaient souvent livrés nus. A part un livre avec quelques programmes de jeux en Basic, je n’avais rien. La machine était nue, je n’avais aucuns programmes en cassette pour lui. C’était d’ailleurs tellement fou de pouvoir lire ou écrire des programmes sur une cassette audio sur un « simple » lecteur audio classique, et comme je n’avais aucune cassette préenregistrée, j’ai du expérimenter pas mal pour réussir mes premières lectures/sauvegardes.

Comme je n’avais rien sous la main pour le programmer que le Basic, assez simple, intégré, et quelques exemples, je me suis donc appliqué à comprendre la programmation de cet ordinateur en tapant des listings, patiemment. Puis, plein d’une nouvelle fougue créatrice, j’ai commencé doucement à les modifier, à me les approprier. Je changeais le personnage jaune, en rouge…. wouah ! un nouveau jeu ! Le labyrinthe allait maintenant se dessiner de haut en bas plutôt que de gauche à droite ! Ou alors, les étoiles qui parsemait ce champ de mines devenaient des dollars. Plus rien ne pouvait m’arrêter 😉

J’ai ainsi passé tout l’été 1984 à apprendre à programmer dessus, à comprendre les boucles for, next, les goto, les gosub (ouuh, c’était compliqué les Gosub..), les Data. J’étais devenu très confiant dans ma capacité à programmer cette machine et à en sortir à peu près ce que je voulais, malgré évidemment ces très faibles capacités graphiques et sa formidable mémoire vive de 4 Kilo-octets. Je réussissais même à faire tenir dans si peu de mémoire un jeu de type Zaxxon en Basic avec un scrolling en 3D isométrique en mode caractère.

Et puis arrive la rentrée scolaire, et bien évidemment, je n’avais qu’une envie, c’était de partager mon incroyable expérience avec mes copains de classe. Mais, malheureusement, je me retrouvais bien seul : Pas un seul d’entre eux ou presque n’avait un ordinateur encore à la maison. Oh, il y avait bien celui-ci qui connaissait un peu car son papa avait un Apple IIc flambant neuf. Ah ! Mais tu l’as programmé ? tu as vu ce qu’on peut faire avec de si incroyable ? Ah non…. Bref, je me sentais seul dans ce voyage informatique, seul sur ce bateau qui partait à vive allure vers le futur. Il fallait que je fasse quelque chose !
Alors, un mecredi après-midi, j’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai préparé un exposé sur l’informatique et le micro-ordinateur. J’ai préparé exprès pour ma démonstration une cassette audio avec quelques programmes que je connaissais bien, en prenant bien soin comme on faisait à l’époque de marquer les temps des différents programmes.

L’école Sainte-Thérèse à Frontignan, dans l’Hérault (34).

Le lendemain matin, j’ai demandé à la maitresse si je pouvais présenter mon ordinateur pour expliquer à mes petits camarades de quoi il s’agissait ! Nous étions le matin, et elle a accepté. Je suis donc rentré chez mes grand-parents à midi pour préparer l’ordinateur et ses accessoires. Je crois même que je suis venu, si mes souvenirs sont exacts, avec la télévision 36cms que j’utilisais alors histoire d’avoir tout mon matériel sous le coude !
J’ai eut une heure pour expliquer tout ce que je savais, tout ce que j’appréhendais de l’ordinateur et de l’informatique. Si vous aviez vu la tête de mes camarades quand j’ai ramené tout mon matériel et branché mon ordinateur ! C’était énorme ! On a joué ensemble sur mon MC-10, notamment à ce jeu d’aventure en mode texte que je trouvais tellement mystérieux. J’ai pu ainsi montrer quelques programmes et à la fin de mon exposé, j’ai même pu répondre à quelques questions de l’assemblée, médusée. « Est-ce qu’on peut faire ses maths avec l’ordinateur ? Il sait chanter ? » « Non, mais il peut écrire des poésies ! », etc. On peut certainement dire que mon exposé était réussi.

Alors, je ne saurais dire si ce premier exposé ou conférence de ma vie sur l’informatique et ses possibilités aura changé la vie de mes camarades, ou leur aura au moins, je l’espérais, ouvert les yeux sur les formidables capacités de ces outils. Toujours est-il que le collège Sainte-Thérèse s’est équipé un ou deux ans plus tard de micro-ordinateurs, et je vous le donne dans le mille… Des TRS-80 Color Computer ! Etrange coïncidence, non ? Qui plus est, la professeur de travaux pratique pris l’initiative de nous donner des cours de Basic et de programmation. Comme j’avais une certaine avance dans le domaine, dès le deuxième cours, j’allais prendre sa place pour faire le cours 😉


Ah, quelle époque rigolote ! Le même mois, qui plus est, ma grand-mère voulant s’équiper d’un ordinateur pour gérer le camping familial, allait acheter une machine extrêmement puissante et révolutionnaire pour l’époque, un Apple Macintosh 128. Mais, ceci est une autre histoire 😉

Philippe Dubois « Prez »